L’objectif de la conférence Paradigme 2018 Le dénominateur commun consistait à mettre en lumière notre humanité commune, peu importe notre origine, notre statut social ou nos convictions. Si nous sommes tous créés à l’image de Dieu, comment pouvons-nous respecter cette image chez notre prochain et apprendre les uns des autres ? Voici un résumé de la conférence d’Andy Smits, directeur des ministères francophones de Pouvoir de Changer.

Dans l’histoire du bon Samaritain (Luc 10.25-37), on s’attendrait à ce que celui qui connaît le mieux les lois et commandements de Dieu ait le cœur le plus compatissant et le plus empreint de l’amour de Dieu. Mais tel n’est pas le cas. Le prêtre et le Lévite sont dépeints comme les « sans-cœur ». Et Jésus choisit de prendre un Samaritain, entre tous, pour illustrer « le bon gars »! Une personne détestée des Juifs, considérée impure, dont le mourant aurait peut-être refusé l’aide s’il avait pu! « Ce sont souvent ceux à l’extérieur du Royaume de Dieu qui en vivent le mieux les valeurs! Nous devrions apprendre d’eux et célébrer les façons dont ils démontrent, à travers leurs actions, qu’ils sont créés à l’image de Dieu. »* Combien il était difficile pour un Juif d’accepter de suivre l’exemple d’un Samaritain!

Il semble évident, à première vue, que la barrière dans cette histoire est un manque d’amour. Mais le vrai problème consiste en la redéfinition du mot « prochain » par le spécialiste de la loi. Il réduit le cadre du mot au minimum afin d’exclure ses ennemis et les personnes différentes de lui.

Trois barrières nous empêchent de vivre la mission de Dieu :

1. Nous surestimons notre bonté et notre pureté.

La pureté rituelle est souvent utilisée pour expliquer le comportement des deux premiers voyageurs, alors que les rituels ne devraient jamais constituer des obstacles à la compassion. Les prêtres ont commencé à diviser le monde entre les purs et les impurs, au lieu de se rappeler que le péché infecte tout le monde et de voir leur propre nature. Ils se considéraient bien au-dessus des autres. Pareillement, il est facile, comme chrétien, de se voir « meilleur » que les autres, parce qu’on a appris à distinguer le bien du mal, à avoir les bonnes valeurs et à faire les bons choix. Nous jugeons les gens qui prennent de mauvaises décisions dans la vie en oubliant que celles-ci reflètent leurs histoires et leurs réalités. Nous oublions que même après avoir rencontré Jésus nous demeurons profondément égocentriques. La paix que nous expérimentons après notre salut ne vient pas du fait que nous sommes devenus de « bonnes personnes » et que notre vie n’est que « roses et arcs-en-ciel ». Notre paix se trouve en Dieu, qui nous pardonne et nous transforme de jour en jour.

2. Nous surestimons la méchanceté du monde.

Nous sommes de plus en plus environnés de cultures, de religions, de valeurs et de symboles différents des nôtres. Nous considérons souvent les gens comme des cas désespérés et des causes perdues s’ils sont trop différents de nous.

Moins nous nous reconnaissons dans les personnes autour de nous, plus nous risquons de passer à côté d’elles et d’ignorer leur souffrance. Moins nous reconnaissons l’image de Dieu en elles, moins nous pouvons vivre une vraie relation avec elles. Plus nous sommes convaincus de leur méchanceté, moins nous voulons établir une relation avec elles. Plus nous pensons que les gens sont mauvais, plus nous attribuons leurs circonstances difficiles à leurs mauvais choix, qui vont à l’encontre de la volonté de Dieu.*

ANDY SMITS

À la limite, ces attitudes peuvent mener à une déshumanisation de l’autre. Le génocide, ou l’élimination d’un groupe de la société par un autre groupe, en est l’exemple extrême. Un génocide commence toujours par une déshumanisation de l’autre. Reconnaître l’humanité de quelqu’un devrait nous inciter à la compassion.

Le fondement d’une relation profonde est une reconnaissance de ce que nous avons en commun. Moins nous partageons de champs d’intérêt avec les gens, plus nous voulons rester dans nos forteresses évangéliques, détachés d’eux. Nous sacrifions parfois nos relations avec des non-chrétiens pour éviter de gérer nos différences de valeurs et de comportements, au risque de juger les personnes plutôt que leur conduite. Nous devenons des pharisiens! Si nous surestimons notre bonté et la méchanceté de l’autre, nous avons de la difficulté à trouver un dénominateur commun sur lequel bâtir une relation. Nous creusons un fossé de plus en plus grand.

3. Nous ne tenons pas compte de l’incarnation.

Il est possible de vivre « religieusement » en ayant une foi purement théorique, qui ne se manifeste pas concrètement. Une foi philosophique désincarnée a peu d’influence sur autrui. Le but de l’histoire racontée par Jésus n’est pas de nous inciter à imiter le bon Samaritain en venant en aide aux gens. En interrogeant son interlocuteur sur le mot « prochain », Jésus veut nous amener à considérer qui est vraiment notre prochain. En Luc 6.27-28, il inclut même les méchants : « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous maltraitent. »

Jésus a quitté le ciel, lieu saint et pur, pour venir nous rencontrer dans notre impureté et notre péché. Il ne s’est pas seulement arrêté en passant à côté de nous; il est « venu » vers nous! Emmanuel : Dieu avec nous. Il a choisi d’entrer dans notre réalité. Il a vraiment « touché » l’impur pour le guérir. Il est mort pour nous purifier et nous donner la vie. Alors, devrions-nous nous contenter de faire de la « pub » pour Jésus?

Le message de l’Évangile inclut le messager qui l’incarne. L’incarnation de Jésus nous rappelle que l’amour de Dieu est concret, réel. La puissance du message de Jésus venait de ce qu’il vivait ce qu’il prêchait. De plus, l’amour s’exprime à proximité. Nous ne pouvons pas nous contenter de lancer l’Évangile comme une bombe du haut de notre forteresse! La proximité permet d’expérimenter l’empathie, de ressentir l’émotion des autres, d’entrer dans leurs souffrances, comme Paul le dit en Romains 12.

Est-ce que j’incarne l’Évangile? Les gens que je côtoie expérimentent-ils l’amour de Dieu à travers moi?

Suis-je prêt à suivre Jésus en allant vers ceux qui sont loin de lui, pour leur démontrer son amour concrètement, avec empathie, et à entrer dans leur vie, leur partageant l’Évangile en paroles et en actions? Est-ce que je cherche à établir une relation avec l’autre?

« Nous sommes invités à marcher dans les traces de Jésus qui s’est incarné, à nous émerveiller devant celui qui a quitté la perfection et communiqué son amour dans son corps, pour que nous puissions vivre l’Évangile dans un monde qui a besoin d’expérimenter l’amour de Dieu. »*

*Extrait de la conférence d’Andy Smith à Paradigme 2018. Pour écouter la plénière, consultez le site web www.conferenceparadigme.org