CET ARTICLE EST UNE GRACIEUSETÉ
DE THE GOSPEL COALITION
TRADUCTION FRANÇAISE FAITE PAR CATHERINE CLOUTIER
« Suivons‑nous Dieu ? »
Mon mari m’a posé cette question au cours d’une marche dans notre quartier. Le chien a tiré sur la laisse. D’un côté, c’était une question surprenante, dont la réponse semblait évidente. Nous pratiquons tous deux les disciplines quotidiennes de la prière et de la lecture de la Bible. À table, nos conversations familiales se tournent vers la sagesse des Écritures. Nous assistons régulièrement à l’Église, en plus d’y servir et de donner financièrement pour sa mission ; nous parlons librement de Christ à nos voisins et amis non religieux. J’écris des livres chrétiens, bon sang !
Malgré cela, j’ai été envahie par les doutes de mon mari. Suivons‑nous Dieu ? Nous nous sommes mariés à 22 ans, rêvant des endroits où nous irions en réponse à l’appel de Dieu. De nombreuses années plus tard, en 2011, nous sommes déménagés à Toronto, la quatrième ville en importance en Amérique du Nord et l’une des villes les plus multiculturelles au monde. Au moment d’écrire ces lignes, c’est une ville couverte de drapeaux arc-en-ciel, fier témoignage de l’éthique moderne de la liberté individuelle, une ville souvent ouvertement hostile à l’intolérance perçue du christianisme.
La question de mon mari a fait émerger cette crainte que malgré notre engagement à voir notre ville être transformée par l’Évangile, Toronto parvient subtilement à ses fins en nous conformant à ses désirs (voir 1 Jean 2.16.) Au fil de notre conversation, nous ressentions tous les deux un besoin pour le genre de renouveau décrit dans le nouveau livre de Mark Sayers : Reappearing Church: The Hope for Renewal in the Rise of Our Post-Christian Culture.
Bonne nouvelle
Sayers, un pasteur et auteur australien, commence par reconnaître « l’excellente bonne nouvelle » selon laquelle le christianisme culturel perd du terrain et est remplacé par la laïcité. Ce n’est pas le moment de s’inquiéter, nous rassure‑t‑il. « Sommes‑nous assommés par les problèmes de notre époque, ou arrivons-nous à déceler les opportunités qui s’offrent à nous ? »
Au lieu de s’inquiéter à propos de l’augmentation de l’isolation sociale et de la maladie mentale, de la fracture et de la polarisation sociale, les chrétiens peuvent célébrer l’espoir lumineux de ce moment historique. En d’autres termes, le verre culturel peut bien être à moitié plein, mais l’Évangile n’a jamais débordé avec autant de puissance. À mesure que les principes de la laïcité se révéleront fragiles et insatisfaisants, l’Église de Jésus-Christ aura l’opportunité de vivre et de proclamer une histoire davantage convaincante et durable pour une époque comme la nôtre.
« L‘aurore suit l’heure la plus sombre de la nuit.. Nous voici, encore une fois, à un tel moment. »
Appel à la repentance
Néanmoins, l’optimisme de Sayers vis-à-vis la société en général chancelle en ce qui concerne l’état actuel de l’Église évangélique. Mais le moment est venu pour un renouveau de l’Évangile, et « l’écart entre [les promesses du progressisme laïc] et la réalité s’accroît. » Sayers déplore que de nombreux évangéliques, épris de la « pseudo foi chrétienne qui promet l’amélioration du style de vie » ne soient pas en mesure de le saisir. Il s’avère que nous nous limitons à vivre un Évangile dilué et éphémère. En effet, l’Église est affaiblie par le péché et l’inertie, l’hérésie et la religiosité. « Au cours des dix dernières années, j’ai vu d’innombrables initiatives incroyables pour le royaume souffrir et échouer parce que les dirigeants et les disciples, qui avaient un cœur pour Dieu, sont tombés dans… tout ce qui a été nommé précédemment. » Voilà ce qui motive l’appel au renouveau de Sayers, le point culminant d’un cycle répété à travers l’histoire de l’humanité. Quand la foi stagne, puis décline, un reste du peuple de Dieu doit, en réponse à l’Esprit, chercher un renouveau de la présence et de la puissance de Dieu.
Sayers cite ce modèle historique de repentance, puis de renouveau, comme étant un modèle fiable; comme le mouvement de 1904 qui s’est emparé de Wales, au cours duquel près de 100 000 personnes se sont converties après qu’un petit groupe de jeunes aient été mis au défi de s’engager à ces quatre choses :
- « Vous devez confesser vos péchés. »
- « Vous devez renoncer à vos mauvaises habitudes. »
- « Vous devez rapidement obéir à l’Esprit. »
- « Vous devez confesser Christ publiquement. »
« Quand nous crions à [Dieu], quand nous nous repentons de l’avoir ignoré et d’avoir poursuivi des plans de renouveau fondés sur nos propres forces, quand nous adoptons une posture de combat dans le but de voir son royaume venir avec puissance – nous voyons qu’il répond. »
Le paradoxe du renouveau
Pour bien comprendre le paradoxe du renouveau, considérons l’histoire de Jonas. Le renouveau s’est‑il produit dans la ville pécheresse de Ninive parce que le peuple, en toute sincérité, s’était repenti en s’enveloppant de sacs et en se couvrant de cendres ? Ou, s’est-il produit chez les Ninivites parce que Dieu, dans sa bonté, avait envoyé son (quoique réticent) prophète marcher dans les rues de la ville et crier : « Dans 40 jours, Ninive sera détruite » ? Autrement dit, le renouveau est‑il possible sans l’intervention de Dieu ?
Bien que désireux d’insister sur les responsabilités qui nous incombent en ce qui concerne le renouveau, Sayers précise qu’un renouveau n’est pas quelque chose que nous pouvons orchestrer. « Nous ne pouvons pas créer un programme ou une campagne de renouveau et de réveil. Car dans l’histoire de l’Église, cela n’a que rarement, voire jamais, connu de succès. » Au lieu de cela, « nous implorons Dieu d’opérer un changement, de commencer son renouveau dans nos cœurs. » Voilà le paradoxe du renouveau : il ne dépend pas de nos efforts, mais il ne se produit pas sans eux. En fait, c’est le paradoxe de l’ensemble de la vie chrétienne, car comme Paul l’écrit dans Philippiens 2.13 : « c’est Dieu qui produit en vous le vouloir et le faire pour son projet bienveillant. » La volonté de Dieu augmente la nôtre, et son intervention ne rend jamais la nôtre inutile.
En gros, d’après Sayers, ce qui est essentiel à un renouveau, c’est d’abord et en fin de compte ceci : la prière. La prière est la mise en pratique de la foi dans tous les sens du terme. L’œuvre de Dieu, même son œuvre de renouveau, ne dépend jamais complètement de nous, mais nous nous mettons quand même à genou. Et c’est ce que Sayers, sa femme et un groupe de chrétiens coréens font au cours de la visite de la chambre de John Wesley à Londres à la fin du livre.
« Seigneur, fais-le à nouveau. »
Jen Pollock Michel
Jen Pollock Michel vit à Toronto avec sa famille. Elle est l’auteur de Surprised by Paradox: The Promise of ‘And’ in an Either-or World (IVP, 2019), Keeping Place: Reflections on the Meaning of Home (IVP, 2017), and Teach Us to Want: Longing, Ambition and the Life of Faith (IVP, 2014). Vous pouvez la suivre sur Twitter.