CET ARTICLE EST TIRÉ DU
BLOGUE DE CONVERGENCE QUÉBEC
Ce qui suit est le premier de trois articles traitant de l’importance de se « situer » dans le temps et dans l’espace. La réalité humaine nous limite à être à un endroit à un moment particulier, bien que les développements technologiques nous portent à ignorer cette réalité, ou même à vouloir la dépasser. Face à cela, l’auteure nous invite à développer une « théologie du lieu », à reconnaître l’importance des limitations temporelles et spatiales à l’épanouissement humain et à l’accomplissement de la mission chrétienne.
« Celui qui est la Parole est devenu homme et il a vécu parmi nous. »1
J’ai l’impression que dans ce monde, l’espace physique est en train de devenir une réflexion après-coup. Ce qui aurait du sens vu que l’une des joies de l’Internet est que l’on peut pratiquement ignorer les contraintes de l’endroit où nous nous trouvons. J’ai remarqué récemment que j’écrivais souvent « Hangouts » à la place d’une adresse dans mon agenda. De plus en plus, il me semble, c’est bien d’être à proximité des autres… mais pas vraiment nécessaire.
Si j’habite loin du campus, je peux soit suivre des cours en ligne, soit faire de la route.
Si je veux m’éviter le temps d’un déplacement, je peux avoir mes rendez-vous sur Skype sans bouger d’un pouce.
Si je déménage loin, il se peut que je puisse conserver mon emploi existant grâce au télétravail.
Comme beaucoup de gens de mon âge, j’ai grandi en portant peu attention aux endroits où les événements de ma vie se déroulaient. Ça m’a toujours paru secondaire aux activités elles-mêmes. Pourtant, notre environnement nous influence constamment, parfois sans que nous nous en rendions compte. Une salle de classe nous pousse à retenir des informations; une table ronde nous incite à collaborer. Et c’est sans parler du côté esthétique. Juste le fait d’entrer dans un café tendance me donne le goût de réfléchir à de nouvelles idées. Si vous avez déjà visité ou demeuré dans un autre pays, vous comprenez le pouvoir que l’endroit peut exercer sur le quotidien.
J’ai passé les neuf dernières années de ma vie à voyager deux heures par jour en transport en commun. (Si vous êtes curieux, cela donne un total d’environ 4230 heures). Au début, c’était pour l’école, puis pour le boulot. Récemment, je me suis rapprochée de mon milieu de travail et je constate combien ce qui se passait autour de moi n’avait pas beaucoup de valeur à mes yeux. Maintenant, le fait de ne pas être consciente de ce qui m’entoure me semble être à des années lumières de la vision chrétienne du monde.
Il y a deux ans, j’étais dans ma chambre en train de lire le premier chapitre de l’évangile selon Luc, juste à temps pour l’Avent. Ce passage parle de l’incarnation de Jésus sur terre. Plus je continuais ma lecture, plus je ressentais de la frustration, parce que je ne comprenais pas pourquoi Dieu agissait ainsi : Pourquoi Dieu s’est-il rapproché de nous à ce point-là? N’y avait-il aucun autre moyen pour lui d’offrir le salut à son peuple? Quelque chose de moins intense ou de plus rapide? Non, c’était impossible. Soudainement, cela me paraissait clair comme de l’eau de roche : il ne peut y avoir de mission sans rapprochement.
Émue, c’était comme si je me trouvais tout à coup en terre sainte. Ce fut un moment divin, que je chéris jusqu’à ce jour, et le déclencheur de décisions majeures qui continuent de bousculer ma vingtaine.
Soudainement, cela m’apparut clair comme de l’eau de roche : il ne peut y avoir de mission sans rapprochement.
Je suis toujours en train d’apprendre ce que ça veut dire d’être présente, vraiment présente : de prendre conscience de l’endroit où je me trouve et de porter attention aux gens qui m’entourent.
Je crois que cela fait partie de vivre pleinement notre humanité telle que Dieu l’a conçue. Mais de plus, je crois qu’il s’agit d’une étape de notre croissance spirituelle. Si nous désirons suivre Jésus, ce rabbin qui parcourait la Palestine à pied, nous allons devoir lLe suivre pleinement, corps et âme, jusque dans le monde qui nous entoure.2
1. Jean 1.14, BDS
2. Pour explorer ce sujet davantage, voici un vidéo fort intéressant.
Élizabeth est équipière avec Pouvoir de Changer depuis plusieurs années. Pendant ces années, elle a travaillé avec de nombreux étudiants et jeunes adultes dans les cégeps et universités du Québec. Elle décrit son rôle inhabituel et souvent mal compris comme ceci : Aumônière. Guide de vie spirituelle dans un établissement non religieux. Vous pouvez suivre ses articles sur www.convergencequebec.com.